Piaule, galetas, taudis
Trouver un logement pas cher est facile : il suffit d'aller voir les organismes gérant les HLM du coin. Tu déposes une demande d'inscription et on te met aussitôt sur la liste d'attente. Il ne te reste donc plus qu'à attendre qu'on t'envoie un courrier pour te proposer un logement. A quelle adresse le courrier ? Heu...
Soyons honnête, ce léger problème est aujourd'hui résolu. Il suffit de te faire "domicilier" dans un foyer, une Boutique de Solidarité ou au CCAS. Quant aux effets collatéraux produits par cette adresse qui te catégorise comme éventuel insolvable...
A propos, n'oublie surtout pas de refaire une inscription tous les six mois, sinon tu redescends en fin de liste. Ce que tu deviens pendant cette attente ? Peux pas tout attendre des HLM, hein, déjà qu'ils se démènent pour te trouver un logement...
Puisque tu es au RMI, tu as accès aux allocations logement versées par les CAF. Le fait de ne pas avoir de fiches de paye présentables te fait gagner un temps fou : inutile de te pointer dans une agence immobillière, même si en vitrine tu vois des propositions à prix très raisonnables.
Le plus simple est de te trouver un de ces hôtels qui acceptent d'être payés directement par la CAF. Ces hôtels sont faciles à reconnaître, ce sont les plus pourris de la ville. Pour y trouver une place, il faut se présenter en début de mois, quand le taulier a fait le ménage dans ses impayés.
Pour la caution, fait une demande de FSL (Fond de Solidarité Logement). Pour éviter la déprime, ne demande pas à visiter avant de signer le bail. Ne soit pas effrayé par le loyer au mois qui pourrait te sembler prohibitif, la CAF a l'habitude et paie sans discuter. Sans jamais faire de contrôle de l'état des piaules non plus. La literie, notamment, c'est quelque chose ! L'insonorisation, par contre, ne posera aucun problème : il n'y en a jamais.
De toute façon, ton séjour dans cet hôtel uniquement occupé par des touristes dans ton genre n'est que provisoire, le temps pour toi de trouver un vrai logement. Les petites annonces des gratuits et des quotidiens sont pleins de propositions d'apparts pas chers. Investi dans une carte téléphonique et un plan de la ville, affûte ton crayon de bois et c'est parti.
Débrouille-toi pour ne pas préciser l'origine de tes revenus au premier appel et soit disponible pour visiter n'importe quand. Pas de panique, tu auras l'occasion de peaufiner ta technique au cours d'une multitude de contacts avant de trouver une argumentation solide pour faire avaler ta situation au proprio. Et puis les offres qui attireront le plus ton attention se révèleront toutes être des taudis que c'est une honte (1) de payer un loyer pour ça.
Si le loyer est très bas, "ensoleillé" signifie dernier étage sans ascenceur et "de caractère" mansardé et mal isolé; "Coin cuisine" = 2 petites plaques électriques, évier riquiqui, pas de ventilation et placards symboliques; "Refait récemment" veut dire que le revêtement de sol s'arrache dans l'entrée; "Refait à neuf" informe qu'une couche de peinture acrylique fragile et salissante cache la misère; "Quartier agréable" rappelle que les bus ne vont pas si loin et "parfait pour étudiant" laisse supposer que les chiottes sont sur le palier; "Tout confort" prévient que tu seras installé dans le quartier le + bruyant de la ville; "Immeuble ancien" et il te sera impossible de planter un clou sans faire tomber la moitié du mur...
Tu comprends bien que si le loyer est raisonnable c'est qu' il y a des raisons à cela. Tu vas rencontrer principalement deux modèles de proprios, des vieux qui ont hérité d'un truc il y a longtemps et qui font le minimum de travaux et des quadras friqués qui ont investis dans des combles et des greniers pour les tranformer en studios à grand coup de placo et de robinetterie en promotion.
Rappelle-toi que les logements les plus accessibles aux rigolos comme toi sont toujours au dernier étage, celui qui n'arrête pas d'avoir des infiltrations depuis la toiture et des problèmes de plomberie pour cause de bricolages infâmes. Ah oui, au fait, le chauffage est toujours électrique, ce qui laisse présager des factures EDF ahurissantes.
Il existe, théoriquement, des exceptions. Bonne chance !