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Pour ceux qui n'y étaient pas


Voici le "conducteur" (aimablement transmis) de la célébration laïque à la mémoire des morts de la rue qui a eu lieu le 11 juin 2002 à l'Hôtel de ville de Paris .

Un extrait d'un courrier de Cécile, de l'association "Aux captifs, la libération", le complète utilement .

 

Première partie

Mots d'accueil : Bertrand Delanoë (Depuis le centre)

Musique, piano et violon (David et Solange) 5mn

 

Présentation célébration (Cécile Rocca lit avec quelques personnes de la rue à ses côtés) (Depuis le centre)
Pourquoi cette célébration ? Depuis des années, trop de personnes meurent à la rue dans l'indifférence totale ; c'est insupportable. Nous sommes tous des êtres humains dignes et respectables quelle que soit la manière dont s'exprime nos vies et nos souffrances ; Notre propos n'est pas de mettre des étiquettes
Nous sommes un collectif d'association et de personnes qui subissent la rue, réunies pour faire mémoire et veiller.

(mot d'accueil lu par un membre du collectif.) (durée, 2 mm) (Géraldine, Autremonde, avec les mêmes personnes de la rue) Depuis le centre

Faire mémoire… C'est veiller,

C'est refuser que la vie s'éteigne
Que le souvenir tombe
Dans le vide de l'oubli.

Nous tous ici présents
Nous sommes les veilleurs
de nos amis morts
Les morts de la rue.

Notre silence ici
est un cri de colère :
Assez de morts de la rue !
Ça suffit !

Nous sommes veilleurs
non pour célébrer leur souvenir
mais pour être vigilants
afin que leur mort
ne soit pas inutile.

Leur mort à la rue,
si nous savons l'entendre,
est une revendication
que nous devons assumer :
Jamais plus des personnes jetées à la rue,
Jamais plus d'expulsions du logement !
Assez de personnes vivant dans la rue,
Assez de personnes mourant dans la rue !

En faisant ici mémoire
des morts de la rue,
nous voulons être ferment
d'une société a-venir,
Toujours à faire venir
par l'effort de tous :
Celle des hommes et des femmes libérés
des injustes inégalités,
vivant, enfin, en humaine fraternité.

Pour sortir de l'anonymat, nous pouvons chacun dire bonjour, échanger nos prénoms et quelques mots avec ceux qui nous entourent. Je vous signale que les images projetées sont des créations de personnes de la rue (CR)


__________
CIRCONSTANCES (circonstances + portraits 2mn 30) Anne Laure, Jean, Eric, Bernard
(depuis les deux extrémités de la salle)
Jean-Yves et Claude sont proches des micros pour réguler les lecteurs divers au long de la célébration

Ces hommes et ces femmes sont morts (CR)

dans la rue,
arrêt cardiaque
sur un banc, avenue Foch
son frère, fossoyeur à Thiais, a appris la mort de son frère en l'enterrant
Vivait sur une grille près de la gare d'Austerlitz où il a été écrasé
à la gare RER d'Arcueil
dans sa cabane
sous un pont de l'autoroute A4
dévoré en partie par des bêtes, dont son visage,
cirrhose
gangrène et diabète
épuisement en forêt
défénestré
en soins palliatifs
à l'hôpital
rue Danton, dans la rue
mort de froid à Versailles
Sur le Quai Henri IV, dont la mort remontait à deux jours,
dans sa roulotte,
brûlé vif,
asphyxié,
chute mortelle
rue de Rivoli,
29 ans de rue
usé,
sous un métro,
épuisé
dans un parking
écrasé,
noyé
seul dans une chambre d'hôtel,
dans un squat,
dans la rue

MINI PORTRAITS Lus par Anne Laure, Jean, Eric, Bernard ( depuis les deux extrémités de la salle)

Mais de leur vivant, ces hommes et ces femmes étaient : (CR)

Ancien chauffeur livreur.
Ancien légionnaire.
Grand cœur aimé de tous, il est devenu marginal à la suite de son divorce.
Epileptique, buvant plus que de raison, il était bon copain avec tous, aidant les autres.
Avait mis de l'argent de côté pour son incinération.
Il avait toujours un mot gentil.
Très craintif
Vivait dans la rue depuis plus de 17 ans
Offrait une fleur quand le RMI était perçu.
Mettait les pièces jaunes de côté, lors de l'opération " pièces jaunes ".
Détestait les foyers où il n'allait que peu et en cas de nécessité.
Il était en marge, mais il commençait à s'en fatiguer, il voulait se poser et y avait presque réussi.
C'était désolant de le voir doucement chuter et nous ne savions comment l'amener à parler.
Ne voulait pas d'aide
se réinsérait
Sa gentillesse à nous proposer un petit morceau de carton pour s'asseoir à côté d'elle, sur des marches très froides.
Il était en réinsertion.
Garçon très doux, très en retrait.

musique 30''


Depuis Notre dernier faire-part, il y a six mois, nous avons eu connaissance de leurs décès, quelque fois longtemps après, parfois par hasard, des morts de la rue (CR)
Cette liste n'est pas exhaustive
(CR)

Pour la commencer, voici deux actes de décès de personnes qui n'ont pas été identifiées, nous les citons au nom de tous les disparus : (CR)

(Jean)
Le onze mai deux mille un, à dix heures et dix minutes, une personne du sexe masculin dont l'identité n'a pas pu être établie, est décédée 52 rue de Rivoli. Le signalement est le suivant : 45 à 55 ans environ, taille environ 1m80, 60 kg, cheveux poivre et sel/roux, yeux marrons, type nord africain.**************
Vêtements : caleçon long noir, ceinture noire, chaussettes blanches vertes grises à losanges, baskets à lacets noires et blanches, maillot de corps noir à rayures, jeans, pull noir à rayures, un autre pull noir.*********************
Bracelet fantaisie. Signes particuliers : une ancre de marine à l'avant bras gauche.******************

(Jean)
Le treize octobre deux mille un, à quinze heures, nous avons constaté le décès, paraissant remonter à deux jours, d'une personne du sexe masculin dont l'identité n'a pas pu être établie.***************************

Le signalement est le suivant : 30 à 35 ans, 1m72, 61 kg, cheveux bruns, couleur des yeux ignorée, type européen. Vêtements : blouson de cuir rouge et noir avec drapeau américain dans le dos et devant, surchemise grise taille L marque Tex, pantalon bleu clair jean's, slip marque Dim, maillot de corps blanc avec sigle " jeune pour l'humanitaire " chaussettes blanches, chaussures marque Nike pointure 43. Tatouages avant bras gauche et épaule droite.*****************************
Le corps a été trouvé Quai Henri IV

Autremonde amène la silhouette et 7 bougies,(impro piano)


Voici maintenant les noms dont nous avons connaissance : (CR)

(depuis les deux extrémités de la salle)

( Erick Bourgeois Compagnons de la Nuit, côté orchestre)
Mohamed BOUSSERGHINE, 64 ans, le 2 juin
Jozsef FARKAS, 52 ans, le 1er juillet
Eric Didier JAMBU,42 ans, le 24 juillet
Yannick HAMOUTTI, dit Nadia, 34 ans, en août
Daniel COQUILLAUD, 54 ans, en septembre
Luc LEBRUMENT, 53 ans, le 27 octobre 2001
Guy CAVAILLAC, 53 ans, en novembre

(plaque amenée au centre, 7 personnes (Compagnons de la Nuit) amènent des bougies et le panneau, impro piano)


(collectif Ivry, côté entrée)
Patrick EVRARD, fin novembre
Hartmut Erich HUEBNER, 51 ans, le 4 décembre
Juan Roberto ASCENSION, 38 ans, le 5 décembre
Jean Pierre LALAU, 46 ans, mort en décembre
Une personne de sexe féminin, 75 ans, le 23 décembre,
Petit Marc, 46 ans, le 23 décembre 2001
Jacky MAIRE, 35 ans, le 24 décembre

(plaque amenée au centre, 7 personnes(Collectif ivry) amènent des bougies, impro de piano)


(Marcel olivier, côté orchestre)
Claude ROUSSEL, dit Petit Claude, juste avant Noël 2001

En 2002

Lionel CASTENETTO, 49 ans, le 1er janvier
Claude PRETSEILLE, le 2 janvier
Gérard FRAYSSINE, 59 ans, le 3 janvier
Ibrahim KANE, dit Baye, environ 45 ans, le 10 janvier
Marcel Marc PERIN, 54 ans, le 12 janvier
Thierry PECHBERTI, 37 ans, le mardi 15 janvier

(plaque amenée au centre, 7 personnes (Hervé, Daniel, Christiane, Pierrot, + 3 à trouver...) amènent des bougies et le panneau, impro de piano)


(Marine, côté entrée)
Marcel, en janvier
Andrew MANNERS, 35 ans, mi-janvier
Jean BRIARD, 56 ans, fin janvier
François René PARESYS, 70 ans, le 24 janvier
Manoël HUDE, 43 ans, mort le 25 janvier
Jean Pierre CHARBONNE dit la Baronne, 56 ans, le 28 janvier
Lazlo RIGO, 70 ans, le 2 février

(plaque amenée au centre, 7 personnes (à trouver par Marie Cécile et Marine) amènent des bougies et le panneau ; impro de piano)


(Michel Dubois, côté orchestre)
Didier CHARPENTIER, 49 ans, le 3 février
Michel SMOROG, 68 ans, le 4 février
Jacques FOSSART, 40 ans, le 7 février
Stanislavs PLATPIRS, 71 ans, le 17 février
Ursula, 50 ans, en février
Jean DESVEAUX, 54 ans en mars 2002
Philippe GIRY-DUCLUZEAU, 55 ans, le 25 mars

(plaque amenée au centre, 7 personnes (par Lumière dans la rue) amènent des bougies, impro de piano)


(Béatrice Paringaux, Restau du cœur côté entrée )
Laurence, 38 ans, le 29 mars
Casimir, 48 ans, fin mars
Bouchon, 55 ans, fin mars
Patrice LEFEVRE-DEPLANQUE, 55 ans, le 5 avril
Michel NAUDIN , 46 ans, mort le 14 avril
Gilbert KIM, 61 ans, le 18 avril
Le Petit Michel, 40 ans, en avril

(plaque amenée au centre, 7 personnes amènent des bougies et panneau (Unité Sans abris), impro de piano)

 

Si vous connaissez d'autres personnes mortes à la rue, ces 6 derniers mois, vous pouvez dire leurs noms, à haute voix, depuis les micros aux extrémités de la salle, pour compléter cette liste. Ceux qui le désirent peuvent amener les bougies qui restent, à leur mémoire. (CR)

"A cette terrible liste de noms, je m'y ajouterais si cela pouvait l'éteindre à tout jamais : 'plus jamais ça'
Avec mon soutien et amicales pensées."

N° 898782 N
Hôpital de la prison de Fresnes.

(Jean, Bernard, Anne Laure, Eric, Marcel)

 

Nous n'amenons pas de fleurs, elles se fanent, les arbres restent. Ces arbres, tout jeunes, qui vont être amenés, symbolisent la durée de notre engagement, la volonté que ces morts ne soient pas inutiles, que notre mémoire, que nos actes, prennent racine et donnent des fruits. Ces arbres seront plantés dans la ville, un jour, ils feront de l'ombre dans des squares, à la mémoire de nos amis, à condition qu'on en prenne soin…(Cécile, avec quelques personnes chroniqueurs)

 

TRANSITION

Chant atelier chant de Atd Quart monde : Faloué, le chant des haleurs.
Pendant qu'on amène les plantes Emmaüs Liberté s'en occupe

 

Deuxième partie

Nous avons énuméré les morts, mais d'eux, vivants, on s'en souvient
Nous écoutons ces souvenirs recueillis auprès d'un enfant : (CR)

Lu par Marie-Thérèse (Côté orchestre)
Claude

Je m'appelle Aurélien. J'ai dix ans et demi. Cela fait en gros cinq ans que j'ai connu Claude. Avec ma mère, je l'ai rencontré à la Station Strasbourg Saint-Denis.
La première fois que je l'ai vu, j'ai pensé que c'était quelqu'un de négatif. Au fil des jours, j'ai appris à le connaître. J'ai appris dans quelle misère il était.
C'est vrai que ça m'a fait de la peine d'apprendre qu'il était mort. Pour moi, c'était pas possible. Quand en revenant de chez mon père, ma mère m'a dit ça, pour moi, c'était incroyable. Parce que, pour moi, Claude c'était un homme très important.
Quand on se rencontrait, on était contents de discuter tous les deux. Ça nous faisait plaisir, à lui et à moi. Quand il me parlait de l'école, il essayait de me faire comprendre qu'il fallait bosser à l'école, et ça, d'une façon comme on parle à un fils. Et ça me faisait plaisir. Et moi, je comprenais très bien, parce que lui, était dans la misère. Il voulait me dire que je prenne pas exemple sur lui ; que sa vie était faite, et que ma vie était en train de se faire.
Ça me faisait de la peine de le voir comme ça à la rue. Mais lui, était habitué à rester dans la rue. Claude, il était gai, sympathique, courageux. Je ne l'ai jamais entendu se plaindre et s'occuper de lui. Il avait du chagrin pour les autres. Il voulait que les autres réussissent. C'était comme s'il s'en foutait de lui, comme si sa vie était faite.
Claude, pour moi, c'est un sauveur…
Quand même qu'il est mort, je sais qu'il reste toujours une petite miette ou quelque chose de lui pour qu'on se rappelle de lui.
La dernière fois que je l'ai vu, en m'embrassant, il m'a dit au coin de l'oreille : " je te dirai quelque chose… "

Aurélien

Musique : piano, quelques notes (45'')

Un homme de la rue nous interpelle par ses réflexions sur la vie et sur la mort : (CR)

Lu par Jean (côté entrée)
SDF

Quand je me regarde, je vois un homme sans logis .

Et mon rêve c'est d'avoir un logis comme tous. Un lit, comme tous les Français en ont un .

Mais mon lit c'est le trottoir. Le froid et la solitude c'est ma maison .

Et une fois sur la route, tu trouveras plus personne qui t'aidera .

Les sans-logis sont des hommes qui doivent mourir sur la route. La société ne les accepté plus, et pourtant c'est la société qui fait les sans-abri. C'est ça la vie moderne .

Encore aujourd'hui on prend les sans-abri comme le rebut de l'humanité. C'était toujours comme ça et ça sera toujours comme ça.
Mort, j'aurai trouvé ma patrie. Parce que la mort c'est la patrie des sans-abris .

Roger

(musique, piano 45'')

A l'enterrement de Bruno, Nounours pour ses amis, ils se sont adressés à lui : (CR)

Lu par Anne Laure (côté orchestre)
Nounours

C'est Chantal, Joël, Pascal, Nanard, Nono, et tous tes amis présents ici.. En ce lieu pour se recueillir devant toi !
Ils sont nombreux, tes amis, tu sais, mais ce jour là…
Tu étais seul comme un homme…
Tu dormais comme un môme !
C'est le destin, Ton destin, c'est la volonté de Dieu… On peut rien faire, frère !
Nounours, on t'oubliera jamais.
Tu es avec nous dans nos cœurs… Chaque heure, chaque jour, à la place de la Mairie, au terrain de boule, ou en face de cette église, ou au collectif SDF.
Nounours, on t'aime beaucoup !
Tu nous manques…
T'as laissé un vide !
Toutes nos condoléances à ta famille.
Que ton âme repose en paix… Que le bon Dieu t'accueille dans son vaste paradis.
Au revoir, Bruno, notre Nounours .

Musique : piano, quelques notes (45'')

Un ami se souvient de Tintin : (CR)

Lu par Eric (côté entrée)
Tintin

Un bon souvenir : C'était un Noël, " Alors, on va faire Noël tous les deux " j'ai dit oui, il restait encore un petit peu d'argent , j'ai dit " viens " et on est allés rue du Faubourg St Denis, il y a tous les commerçants là on s'est acheté tout ce qu'il nous fallait, pas grand chose, hein, des huîtres, du poulet cuit le moins cher, mais il est très très bon, pas du poulet daubé, c'est du poulet frais qu'ils font; et on a pris du vin, et il lui fallait une demi baguette de pain, s'il mangeait pas de pain, il était pas malade mais...fallait du pain. On est remontés dans la gare, elle a pas fermé à ce moment là, et on a fait notre petit réveillon tous les deux. Et d'un seul coup, je le vois se lever, c'est là que ça me fait sourire parce qu'il était adorable, il s'est levé et il fait : " on a bien mangé " " Oui ", il dit : " Dans cette gare, y'a pas de musique " Il s'est levé malgré les broches qu'il avait dans les jambes; il s'est levé et il s'est mis à danser devant moi, et il m'a levé, il m'a tiré, et il a voulu que je danse avec lui ! Les gens qui prenaient le train de Strasbourg du soir, ils sont passés par la voie 25, ils nous ont vu danser tous les deux, ils ont dû se dire " ils sont fous ces deux là! "

Jean Pierre la Baronne, mort un an après son ami Tintin

Musique : piano, quelques notes (45'')

 

Transition

Atelier chant atd_quart monde : "Quand on n'a que l'amour " (Brel)


Quand on n'a que l'amour
À s'offrir en partage
Au jour du grand voyage
Qu'est notre grand amour

Quand on n'a que l'amour
Mon amour toi et moi
Pour qu'éclatent de joie
Chaque heure et chaque jour

Quand on n'a que l'amour
Pour vivre nos promesses
Sans nulle autre richesse
Que d'y croire toujours

Quand on n'a que l'amour
Pour meubler de merveilles
Et couvrir de soleil
La laideur des faubourgs

Quand on n'a que l'amour
Pour unique raison
Pour unique chanson
Et unique secours

Quand on n'a que l'amour
Pour habiller matin
Pauvres et malandrins
De manteaux de velours

Quand on n'a que l'amour
À offrir en prière
Pour les mots de la terre
En simple troubadour

Quand on n'a que l'amour
À offrir à ceux-là
Dont l'unique combat
Est de chercher le jour

Quand on n'a que l'amour
Pour tracer un chemin
Et forcer le destin
À chaque carrefour

Quand on n'a que l'amour
Pour parler aux canons
Et rien qu'une chanson
Pour convaincre un tambour

Alors sans avoir rien
Que la force d'aimer
Nous aurons dans nos mains
Amis le monde entier



(Vérifier papiers et stylos sur les tables, libérer de tout ce qui peut les encombrer, bougies restantes…)(Claude Wiener et Jean-Yves Quilien)

 

3ème Partie, l'engagement citoyen.

(Percussion)

Marcel :
Il ne suffit pas de faire mémoire. Nos copains sont morts de ne pas trouver place avec les autres, et pour bien des vivants aujourd'hui, l'exclusion continue. La mort les attend.
Hervé : La mort les attend

(Percussion)

Lecteur : (Jacques Loch) : Clamé depuis le centre :

APPEL AUX CITOYENS
pour le respect de l'égale dignité de tous

Lorsqu'une personne vit et meurt dans la misère,
C'est sa dignité qui n'est pas respectée,
C'est notre dignité à tous qui est atteinte.

(Percussion)

Lecteur : (Mireille Zedin ) clamé depuis le centre

Nous avons une conviction :


     La misère n'est pas fatale

Nous proposons un engagement :


     chacun peut agir, à sa manière, contre la misère.


(Percussion)

Jean-Claude Caillaux (depuis le centre)
Pour contribuer à développer un grand courant contre la misère, je m'engage pour le respect de l'égale dignité de tous, et je veux chercher à :
* agir personnellement dans mes lieux de vie et de travail pour refuser toute forme d'exclusion d'enfants, de jeunes, d'adultes ou de familles.
* soutenir les personnes et les projets qui assurent aux plus défavorisés comme à tous la pleine reconnaissance de leur égale dignité et de leurs droits fondamentaux.
* veiller à ce que les responsables publics, à tous les niveaux, mettent en place et appliquent les politiques, les mesures et les orientations préconisées par la loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions

(Percussion)

Cécile (depuis le centre)
Vous êtes tous invités à manifester cet engagement contre la misère en allant vers les tables. Prenez le temps de regarder les propositions. Vous pouvez écrire votre engagement sur place, et le laisser sur la pelouse centrale, en hommage aux morts de la rue, ou si vous avez besoin de plus de temps, emmenez le formulaire pour le remplir plus tard, et renvoyez le à l'adresse indiquée .

Musique pendant les signatures : Orchestre et chœur des Universités de Paris nous offrent Brasileïas, de Vila Lobos (11 mn)

Mot final :

Cet hommage aux morts de la rue se termine.
Merci au Maire de Paris, à ses adjoints, et à toute son équipe pour l'accueil en ce lieu.
Gens de la rue, associations, artistes et musiciens, multiples services de la mairie, nous avons construit tous ensemble cette célébration.
Nous venons de vivre un moment important.
Quant à nous, collectif " Les Morts de la Rue ", nous poursuivons notre action et espérons la collaboration du plus grand nombre.
Ceux qui le souhaitent pourront laisser leurs coordonnées sur les cahiers dans le salon mitoyen.
Maintenant, chantons " Freedom " !

Chant
Atd : Freedom

Invitation au buffet par un membre de la Mairie : Mylène Stambouli

orgue de barbarie, avec Riton la Manivelle en allant au buffet


(1) Extrait d'un courrier de Cécile (17/06/02) : Etonnant!! Nous étions environ 700 dont la moitié vivant ou ayant vécu à la rue.
Digne, vrai, et chacun était chez soi. C'est la première fois, en 18 ans de présence à la rue que je vois une telle mobilisation .

[...] il faut que tu imagines les lieux et 5 écrans géants. Sur celui du centre, une caméra projetait ce qui se passait sur la pelouse centrale: noms amenés, bougies, arbres, engagements... Sur les 4 autres, des peintures et photos faites par leurs copains à leur mémoire.
Un buffet formidable, non pas des petits fours, mais des salades joyeuses, de la variété de viandes, des fruits et pâtisseries sublimes, des jus de fruits pressés... Le top! où les serveurs étaient d'une très belle attention... Et tout le personnel de la Mairie qui s'est pris au jeu.
La parole circulait entre les personnes d'où qu'ils viennent.
Les quelques habitués des salons observaient que pour une fois, c'était pas guindé!

De la rue ou pas, de grands fauteuils à acoudoirs dorés faisaient l'affaire!
Riton la Manivelle, à l'orgue de Barbarie nous a même fait chanter et danser (ceux qui voulaient)
Une grande dignité et beauté. Pas de fausse note ni de violence.
Etat de grâce!
Un signe sur la route à poursuivre, une étape seulement!

Il faut poursuivre:
Le lendemain, on me téléphonait d'une petite ville de province: un homme de 32 ans qui vivait à la rue est mort. Enterré en terre commune, sans que ses copains ne soient prévenus. Ils préparent une croix qu'ils peignent à sa mémoire et veulent poser sur sa tombe: on ne veut pas leur dire où il est enterré... Un travailleur social me demandait conseil...
[...]



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